Fondé en janvier 2014, le parti Podemos, en français « nous pouvons », avait surpris la classe politique espagnole en enregistrant de bons résultats à l’occasion du scrutin européen de 2014 et des élections nationales de 2015 et 2016. Pourtant, aujourd’hui les résultats électoraux de la formation semblent stagner. Représentant l’archétype d’un nouveau populisme de gauche apparu en Europe à la suite de la crise économique de 2008, Podemos est proche d’autres formations ou tendances politiques qui semblent rencontrer les mêmes difficultés : la France insoumise, Syriza, le Corbynisme.
Des recherches menées par Arthur Borriello - Cevipol, Faculté de Philosophie et Sciences sociales - analysent la situation de Podemos pour mieux comprendre le sort du populisme de gauche européen en général.
Généralement, les recherches étudiant le destin des nouveaux partis nous enseignent que leur pérennisation est l’exception plutôt que la règle, ce qu’elles expliquent par des facteurs objectifs (attitude des partis établis, facteurs institutionnels, variables sociodémographiques, etc.) valables dans n’importe quel contexte national.
« Notre article plaide pour une approche plus contextuelle et subjective, sachant que le contexte d’émergence de Podemos est très spécifique (l’Espagne post-crise de 2008) et que ce qui pourrait être considéré comme un succès pour d’autres nouveaux partis (une relative stabilisation dans le paysage politique national) est vécu comme un échec pour cette formation qui ambitionnait de devenir une force majoritaire », souligne Arthur Borriello.
Afin d’expliquer cet échec « subjectif », l’article met en relation, d’une part, les paradoxes du contexte sociopolitique dans lequel émerge Podemos (un vide représentatif partiel, causé par le déclin incomplet des partis politiques établis), et, d’autre part, les choix stratégiques de Podemos qui l’ont déforcé dans ce contexte. Parmi ces derniers, la sous-estimation de la résilience des partis politiques établis (le Parti socialiste et le Parti populaire), la dépendance trop forte à la figure du leader (Pablo Iglesias) et le choix d’un électoralisme exacerbé qui dessert le travail d’enracinement plus profond dans la société espagnole.